A l’abord de ce billet, j’ai juste peur de ne pas trouver les mots pour retranscrire l’expérience vécue pendant ces 15 jours au Togo. Même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais pas pu imaginer ça !

10 ans plus tard, je reprends la route du mystère africain. La route du cœur, du partage, de l’attention exacte…avec certes une petite appréhension… On ne revient pas sur une terre qui nous a tant offert sans peur de ne pas retrouver cet amour profond qu’elle avait éveillé en ce temps-là ! 

Mais les signes égrainés sur le chemin de ce retour ne pouvaient pas me tromper. 

Me voici en partance le 19 janvier. Dans la salle d’embarquement oh surprise, je rencontre un ami Français de 15 ans plus tôt chez lequel j’avais vécu une expérience incroyable dans la brousse. Benoit. Benoit dont la vie a basculé au Togo il y a bien longtemps déjà ! Incroyable. 10 ans et on tombe dans le même avion ! Un voyage qui prend un gout particulier puisque nous allons le passer à papoter. Je n’en revenais pas, les signes continuaient de se manifester. Je redoutais l’émotion durant mon voyage, à mon arrivée…et là je me trouve comme dans une salle d’attente où l’on me préparait lentement à mon arrivée…

J’ai débarqué, retrouvé mon très cher Désiré, su que la parenthèse des dix années avait été gommée. J’ai aimé instantanément, j’ai vibré comme si c’était hier, comme si nous ne nous étions jamais quittés ! l’énergie est remonté comme un élastique tiré au maximum. Juste repris le cours du temps, des évènements…la fusion à opéré sans détour et sans retenue…le mystère africain…tout était là, pas la moindre virgule ne manquait, c’était plein, complet, entier, sans rature… 

C’était fort, beau, poétique, magique, sacré…

J’ai ouvert. Ouvert en grand la vie en moi, laisser circuler le fluide…10 ans de retenue…et la source à rejaillit ! C’est un peu comme si pendant ces 10 années un goutte à goutte arrosait une graine, entretenait la vie dans mon cœur endurcit…dessous les braises une force divine attisait le feu…je ne le savais pas ! 

Pourtant si je creuse un peu plus encore, je comprends que pendant ces dix années de pause-Afrique, de pause-amour, quelque chose a muri. J’étais en mode : « fermeture pour travaux intérieurs »… puis j’ai voulu réouvrir, j’ai pris conscience que la fermeture temporaire s’éternisait… J’ai demandé l’amour en moi, ce vent frais qui traverse nos vies, j’ai demandé l’évidence, le sens…j’ai médité, médité tous les jours pendant 3 ans sans relâche, sans aucun résultat apparent. Je continuais sans rien attendre… je voulais me rencontrer…m’abandonner à qui je suis ! 

Et les portes de mon château intérieur se sont ouvertes d’un seul coup, d’un seul, sans prévenir…

J’ai d’abord passé deux jours à Lomé la capitale pour m’acclimater un peu à tout, la chaleur ( 32°), l’ambiance, la vie togolaise : Une journée dans la famille de Désiré avec ses enfants et ses fleurs ( il adore les fleurs ! ) et une autre journée à L’IUT de Lomé où il donnait des cours. Il faut vous dire qu’en Afrique de l’Ouest, tu peux aller partout et assister à tout ! je me suis donc assise au fond de l’amphi, j’ai observé les étudiants se marrer gentiment de ma présence et admiré l’ambiance de ce cour de 3h de Marketing ( un sujet pourtant vraiment rébarbatif pour moi ). Comment vous dire… si tous nos profs étaient comme lui, nos jeunes auraient forcément une autre image de l’éducation. Il y a bien sûr un peu de fermeté, mais tout en douceur, de l’attention, de la chaleur, des rires… ils doivent l’aimer leur prof qui pour 3H de cours gagne 8 euros environ. Admiration…

Puis départ pour le village de Kuma Tokpli, là où il y a 17 ans je débarquais en taxi-brousse en compagnie de Nicolas et Jean-Paul.  Là où Désiré et tous les habitants étaient présent pour m’accueillir en chanson, pour inaugurer l’ouverture du premier jardin d’enfants du Canton du Kuma. Mais avant ça, la route, pas en taxi-brousse à 5 derrières avec des trous dans la carrosserie pour une fois, non en voiture perso avec mon chauffeur, la classe ! J’ai humé, observé, gouté sans relâche…Baobabs, grands arbres, j’adore les grands arbres du Togo, ils grimpent, grimpent, grimpent pour rejoindre le ciel sans jamais s’arrêter… les termitières géantes, et les vendeuses de fruits et légumes sur le bord de la route…plusieurs  arrêts pour faire les courses. Peu à peu je retrouvais tout, cette sensation étrange où quand tu sors de la voiture, une nuée de femmes surgissent de partout pour te vendre mille fruits et légumes de toutes sortes. Assez impressionnant pour nous qui ne comprenons pas la langue…mais j’ai très vite repris le gout de leur énergie. Avec la dernière vendeuse avant d’arriver à Kpalimé, j’ai retrouvé la beauté forte de ces femmes… Puis Kpalimé, petite ville de province grouillante, amusante… Ça cri, ça hurle de la musique dans des enceintes, mais c’est surtout les couleurs qui vous attrapent, elles s’allument sous vos yeux en un festival vivant et chaleureux. La négociation pour acheter des légumes, là je m’écarte un peu car évidemment c’est toujours plus dur avec un yovo ( blanc ) à côté ! 


Le blanc au Togo et dans toute l’Afrique, c’est l’argent… Au Togo, il n’y a pas de salaire comme dit Désiré, même les fonctionnaires qui travaillent sans relâche et qui ont fait de grandes études ne gagnent rien, a peine de quoi nourrir leur famille et il faut toujours courir pour avoir plus…c’est ainsi au Togo ! le Togo, un « département français » sans les avantages. La Françafrique, ça vous dit quelque chose, rien n’a changé depuis les indépendances. On pille, on exploite et le peuple rame, la misère gagne…comme dit un ami français, un jour ils crieront : « remboursez ! » C’est profondément injuste, mais tant que ça ne changera pas chez nous, ça ne changera pas non plus là bas ! 

Et pourtant, malgré tout ce peuple profondément doux et non violent nous offre sa confiance et pour moi c’est l’inverse qui se produit, je vois en eux les plus grandes fortunes planétaires, producteurs de richesses humaine. Nous sommes les pauvres, les handicapés du vivant, les pilleurs d’humanité…On dit que j’ai la peau blanche et le coeur africain… c’est un peu vrai !

Comment ne pas admirer, aimer et se taire, surtout se taire et écouter ! Quelle leçon aurait-on à donner ? 

J’en ai trop rencontré de ceux-là, de ces gens qui savent ce qu’il faut faire et comment, de ceux qui tout à coup face à la misère se sentent revivifiés parce qu’ils ont les poches pleines et le coeur en vrac. Et ils finissent toujours déçus et seul de retour chez eux en occident. Mes amis Togolais ont tant de leçons de vie à nous offrir que Chut…Ecoute…Sens… tu entendras forcément autre chose, quelque chose qui te manques, que tu cherches profondément…

Je m’égare, mais pas vraiment en fait car c’est tout les jours que la question sur l’état du pays revient sur la tapis au Togo. En fait, c’est un peu comme chez nous, la différence avec avant, c’est qu’aujourd’hui tout le monde sait ce qui se passe et où va l’argent même au fin fond des villages…et ils espèrent des gilets jaunes et autres rebelles de chez nous !

Je reviens. Direction le village. Kuma Tokpli dix ans plus tard. l’électricité qui n’existait pas à l’époque. Y’a la lumière dans les maisons, youpi !  J’ai coutume de dire que c’est mon village pour la retraite…

Une petite maison simple un peu à l’écart du village en pleine nature. Quand je parle de Nature, là-bas, c’est dense, tropical, ça pousse ! Installation et grosse araignée sur laquelle évidemment je tombe en premier. «  Salut me dit-elle bienvenue au pays ». Il me faudra deux jours avant de me l’enlever de la tête celle-là ! 

Puis la nuit tombe, et quand la nuit tombe au village, c’est un concert symphonique qui se lève…Oiseaux, chiens errants et autres espèces s’harmonisent. Nul besoin de monter le son, il est fort ! J’écoute ce tumulte de nuits remerciant chaque instant…

Puis les matins frais, où tu te lèves ivre des fragrances inhabituelles, les fleurs de café… l’effervescence est de mise…et l’arbre à palabres qui t’attend avec son petit banc pour la méditation du matin et le remerciement encore et toujours. J’ai remercié tout le temps, tous les jours sous l’arbre à palabre tout vert, taillé en pointe, sous lequel à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, tu peux déguster la fraicheur ! 

Le premier jour fut consacré à une balade à la cascade pour voir le jeune qui anime des ateliers de peinture végétale. C’est un petit coin de paradis, une cascade et un espace pour se détendre avec ses peintures qui pendent sur un fil. C’est frais, ombragé et ce jeune à de l’or dans les mains tandis qu’il ne le sait pas et qu’il gère son petit business avec humilité et conscience. On y reviendra le lendemain pour suivre son atelier, je ne pouvais pas rater ça, moi qui pratique l’aquarelle. Un départ depuis la maison et l’on passe de plantes en plantes pour récupérer celle qui créerons les pigments. C’est ainsi que commença la peinture dans l’histoire, qui le sait encore, dans quelle école d’art, on enseigne ça ! Après avoir récupéré les plantes un peu partout dans la brousse et m’avoir expliqué quelle plante donne quelle couleur, on arrive à la cascade pour le même exercice avec les cailloux qui donne de la couleur. Puis on fabrique la peinture en écrasant, en pilant les feuilles et les fleurs sur des pierres spécialement aménagées. Je suis toute en émoie…c’est beau, tranquille, intelligent… ensuite je peindrais ma propre toile . Une expérience inoubliable que je compte bien retransmettre à ma prof d’aquarelle avec pourquoi pas l’organisation d’un stage à la clé !  A suivre