Un texte sur mon p’tit loulou tiré de mon premier bouquin.

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Il ne restait que lui, le dernier-né de cette longue épopée.
La place était libre pour ouvrir mon cœur, mes bras : nous pouvions enfin accéder l’un à l’autre.
Je sentais en lui la force du faible, ce petit bout de vie, petit bonhomme de sept ans à peine, capable de réveiller tout, autant de misères que de folies.
C’était difficile. Il était là présent au cœur du tourment tandis que je brûlais en dedans. Impossible de l’aimer tellement je l’aimais. J’avais mal, c’était trop chaud, je recherchais le frais, la douceur de cet instant où dans un premier cri, il est apparu !
Mes voix salvatrices me poursuivaient : « Il me dépassera, il ne peut pas reculer, pourquoi j’ai peur comme ça de le briser ? Il n’est pas si fragile, il trouvera bien sûr sa vérité, son soleil en dedans. Petit oiseau sauvage pourquoi m’a-t-il choisi pour être sa première demeure ? »
J’aurais voulu lui donner la lune et les étoiles et les rivières et la brise de juillet et les feuilles d’automne et le manteau de neige et puis tout l’univers…
Je ne trouvais que quelques fugaces instants de frissons éphémères.
Pourtant, ils étaient là, alors je décidais de les regarder. Le rideau était levé…
Ces espaces agrandis quand nous parlions aux arbres… Bien sûr qu’ils nous répondaient…
Lui, dur comme fer il soutenait au copain que les arbres, ça parle, mais le copain il ne peut pas le savoir, il n’essaye pas !
Surtout ne pas rire, ce n’était pas une plaisanterie, mais un recueillement, une église du dedans.
Moi, je me sentais fier d’avoir déposé sur le flan de son cœur une certitude intense qu’un îlot de bonheur sera toujours présent dans la sève de l’arbre, le chant des oiseaux, le vent, la pluie et le brouillard.
Je sentais un sourire intérieur presque malin quand j’affirmais, avec autant de foi que lui, au grand type qui ne croyait en rien, qu’effectivement c’est ainsi, la nature, elle nous parle !
Parfois nous partions aussi pour la chasse aux fantômes avec l’aspirateur.
D’autres fois, nous sentions la lune descendre vers nous avant de s’endormir pour laver notre corps de tous ces petits monstres fabricants de colères et la rendre ensuite à ses amies les étoiles.
Je me souviens maintenant quand ses hurlements déchiraient même le vent, ce n’était pas « fait dodo Colas mon p’tit frère » qui apaisait son tourment, mais bien quand soudain, une source inspiratrice me soufflait à l’oreille les chants de mes années guerrières : « Princesse inaccessible, je reviendrai demain, le chant de la colère, la vieille… ».
Aucune ressemblance avec les chansons enfantines au contraire, plein de « gros mots » partout ! Mais c’était le vivant qui remontait de moi, pas seulement la chanson, tous les personnages, toute la troupe étaient là autour de lui. Il s’endormait, je n’en revenais pas !
Et quand après une fâcherie réconciliée, il me regardait droit dans les yeux pour me dire : « tu vois maman, parfois nos réponses se rencontrent »…
Ce jour là, J’ai cru que j’allais me liquéfier, tomber en syncope, bondir jusqu’aux étoiles, boire la mer entière, aspirer l’univers, tellement je le trouvais beau.
Oui, ils étaient bien fugaces ces moments de répit, mais quand je les écris, ils sortent de l’armoire en carnaval doré, les uns derrière les autres, déguisés, ils deviennent gigantesques, ils prennent toute la place au cœur du mystère.
Et c’est ce que je veux, exactement qui arrive. Je sens que ça résiste pourtant, comme d’entrer en prière, mais c’est tellement bon de sentir mon âme descendre dans le corps, encore !