La Serre numérique et l’école Rubika

De retour à la maison après cette grande aventure du nord de la France et de la Belgique. 13 jours d’émotions fortes, de rencontres et de découvertes…

Je suis là partagée entre l’envie de croquer la vie à pleines dents, de me jeter corps et âme dans ce grand chantier du reste de ma vie qui me parait assez excitant et celle de me recroqueviller dans le passé… 

Dans le fond, j’ai choisi, mais la tâche n’est pas de tout repos. 

Le chantier est ouvert. En me levant ce matin je regardais déjà les murs de ma maison en me demandant de quelles couleurs j’allais les repeindre, mais « calmos » ma grande sinon je vais partir en cacahuète dans tous les sens… 

Méditation, piscine et organisation seront mes maitres mots de ce premier matin du reste de ma vie.

Des mois que l’on préparait ce voyage au bout de la France, des mois qu’il était mon phare avant de commencer le nouveau chantier, c’est fait et franchement au-delà de l’aspect pratique qui c’est très bien passé, ce fut une aventure humaine incroyable.

Une sorte de pèlerinage…une truc étrange !

Qui aurait cru qu’un jour dans ma vie, je grimperais tout en haut de l’hexagone  pour y passer presque 15 jours ? 

Ce nord qui depuis le sud nous parait si loin, si froid, si peu envieux… 

Ce nord et son passé industriel, ses corons… Zola, Germinal, ces gens qui crevaient tout au fond des mines de charbon… 

Ce nord qui pourtant me donne cette impression de déjà vu, qui possède quelque chose qui me ressemble, qui résonne en moi ! 

Eh oui, quand je suis arrivée dans le sud, je me suis souvenue que j’avais une arrière-grand-mère paternelle qui venait de Figureras en catalogne juste à côté de Perpignan et il vient de m’arriver la même chose dans le nord. J’avais également un arrière-grand-père mineur, mais cette fois-ci que j’ai bien connu et j’ai eu cette impression de déjà vu, déjà sentie…j’avais écrit un billet sur lui : Arrière grand père . C’est étrange comme la vie nous ramène vers des lieux déjà exploré par nos ancêtres…

Exactement comme dans « bienvenue chez les chti », on est arrivée sous la pluie. Sur la station d’autoroute entre Paris et Valenciennes, j’avais froid, pas une seule paire de chaussettes dans ma valise…

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Puis Valenciennes, une petite ville dans laquelle on vient rarement par hasard. Mignonnette, avec ses maisons en brique, parfois de maître, d’autre fois plus humbles, ses estaminets, ses restos de cuisine locale, délicieuse mais où tu prends 2 kg en 1 repas : Fromage, frite, bière…

Et surtout, et surtout la gentillesse des gens du nord, ce n’est pas un mythe ! 

A peine posé le pied dans la ville c’est ce que l’on ressent. Accueillant, chaleureux ces gens-là. Ils sont sincèrement content que tu sois là, chez eux… A l’inverse  ici dans le sud, quand tu dis que tu vas dans le nord, on te regarde bizarrement d’un air de dire, «  t’’es pas un peu frappé », d’ailleurs personne ne connait Valenciennes, ils confondent avec Valence…

Et pourtant… un peu d’ouverture ne serait pas de trop !

La pharmacienne de la place d’Armes me disait que je ne pourrais plus repartir, elle n’a pas tout à fait tort… c’est une région on ne peut plus attachante…

Mais venons-en au vif du sujet, j’étais à Valenciennes pour franchir une étape importante de ma vie. J’allais accompagner mon fils qui poursuit ses études dans une très belle école d’art et de jeux vidéo qu’on appelle RUBIKA. 1000 km de distance de chez moi. Y’a eu Toulouse à 200 bornes et maintenant Valenciennes. Un changement de relation qui s’annonce, le petit n’est plus, il a laissé sa place à l’homme en devenir et la maman que je suis ne sait plus où elle habite…

Se rendre utile, sentir que l’on sert à quelque chose et continuer à faire des choses qu’il pourrait faire lui-même par peur de la séparation, de l’éloignement. S’il n’a plus besoin de moi, alors il n’aura plus de raison de me voir !!!! Mais quel mauvaise idée ! 

Les premiers jours ont été, comment dire… C’était les derniers jours du reste de ma vie ! Installation dans le studio, courses, courses et courses encore… Moi j’étais dans mon élément contente de partager ces derniers moments avec lui, mais lui au milieu du temple de la conso, il commençait à se rebeller. Moi : «  Mais tu ne vas pas prendre ça, c’est cher, prendre plutôt ça “ lui : ‘mais lâche-moi, laisse-moi me tromper, arrête de me dire ce que je dois faire’. Ah merde ! Et puis, il se barre fâché, à l’autre bout du supermarché et je me retrouve seule, perdue, oubliée de tous ! 

Sur le coup, y’avait rien à faire, je ne comprenais pas ! Je n’allais pas lui laisser payer 5 euros le pot d’olive alors que 2 rayons plus loin, il aurait été à 2 euros. Cette histoire mine de rien m’a beaucoup déstabilisé et le soir dans ma jolie maison Airbnb louée pour l’occasion, j’ai reconsidéré l’affaire ! 

Je me suis rendue compte à quel point certaines habitudes sont ancrées dans notre quotidien de maman. 21 ans de choix pour lui, à sa place ou presque ! Soudain, j’ai vu une montagne apparaître devant moi… Une montagne infranchissable qui allait m’aplatir, m’écraser et me ratatiner en moins de deux… forcément ! Je tirais un fil à travers un détail à la con et il n’en finissait pas le fil de se dérouler…

Comment j’allais réussir à le laisser acheter de la merde, du saumon aux hormones (nan c’est pas aux hormones, mais le saumon si tu le prends pas bio ou au moins label rouge, il te défonce la santé), des merdes ‘pesticidées, colorisés et conservatisées’ au E345 et 5600… comment j’allais réussir ça, moi qui ai toujours pris soin de lui proposer de la nourriture saine… Un tsunami me recouvrait !  Comment j’allais faire pour ne pas lui répéter 15 fois la même chose sur le chauffage qu’il faudra économiser, sur les douches sous lesquelles il ne faudra pas rester 3 heures, sur la patafix qui va bousiller le mur et la caution qu’on nous rendra pas ! 

Comment j’allais le laisser vivre et faire son expérience ?

Comment j’allais moi-même vivre sans cette impression d’être utile, de ne penser qu’a son bonheur à lui, enfin ce que je crois être son bonheur ? ( la subtilité est importante )

C’était le dernier jour de ma vie d’avant. Le lendemain, la rentrée, et j’allais me retrouver seule dans cette maison super jolie, en brique, classée des années 1600 et quelques, mais qui soudain me semblait hostile, sans âme, froide et sombre. Mais pourquoi j’avais prolongé mon séjour si longtemps, pourquoi je n’avais pas choisi de repartir juste après la rentrée… puisque je n’avais plus aucune utilité… C’était un grand moment ! je ne vous cache pas que j’ai versé toutes les larmes de la maman qui doit se résoudre à reconsidérer sa vie à partir d’un autre point de vue… Et comme en plus, je rendais la maison, j’allais devoir m’installer ailleurs, dans une chambre chez quelqu’un que je ne connaissais pas… BOUH…

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J’ai même pensé prendre n’importe quel billet, à n’importe quel prix pour rentrer chez moi, fuir au plus vite cette sensation si désagréable de vide, de perdition au confins des terres froides du nord…

Puis il m’a raconté sa première journée, puis j’ai déménagé, rendu cette maison qui était devenue frigorifique pour m’installer chez Nadine. Le comble… la porte à côté de chez mon fils et je vous jure que je n’ai pas fait exprès ! La vie est une grande blagueuse…

Nadine, un ange sur ma route… celle qui est et restera la très belle femme et surtout la très belle âme de mon passage vers l’autre étape de ma vie ! 

Nadine et sa fille Diana. Il est des rencontres pour lesquelles les mots deviennent superflus… 

Je suis entrée chez Nadine comme on entre chez soi ! 

Nadine, d’origine Syrienne. Magnifique femme de 39 ans, sportive, prof d’anglais, qui vit seule avec sa fille comme tant d’autres de nos jours. Au bout d’une heure, j’étais déjà à table avec elle… et bla bla bla, bla, bla bla… Et tenez-vous bien, de la cuisine libanaise, enfin syrienne, mais c’est pareil, ma préférée ! 

Un océan d’échanges et de partages comme on le vit rarement… 

Et quelque chose à switché en moi par rapport à mon fils, la montagne est devenue colline puis plaine du nord et j’ai pu partir sereinement, je me sentais allégée, un poids s’envolait, j’étais en confiance pour attaquer le chantier du reste de ma vie…

Puis le bus qui m’a tranquillement transporté à travers les plaines du nord jusqu’à Charleroi en Belgique. Mais bien sûr que j’ai rencontré Cécile, ma copine de blog à Charleroi. J’ai même passé l’après-midi chez elle avec sa poulette et son barbare. J’ai adoré ses murs peints en noir. C’est vrai que quand elle le racontait sur son blog, je m’interrogeais sur ce que ça pouvait donner et ben j’ai vu et c’est superbe, très élégant… son jardin opulent, abondant avec son parterre de tomates cerises et autres douceurs qui s’offrent avec plaisir à la cueillette, sa poulette qui fabrique du savon rose et qui m’a accompagné avec une efficacité redoutable à l’aéroport pour mon grand voyage retour et puis Cecile avec sa grande sensibilité et ses mille et une techniques de développement perso, écolo, déco, fend chui… tout ce que j’aime en fait ! 

Une halte bienvenue qui elle aussi aura servi de pont, de transition vers ma nouvelle vie…

Et pour finir, sans doute un peu sonnée par tout ça, j’ai fait deux conneries à l’aéroport : 1/ me couper le doigt, je ne sais pas du tout comment mais j’ai passé tout le voyage avec le pousse écrasé sur l’index pour compresser la plaie qui se rouvrait sans cesse. Vous imaginez la scène, tu passes la douane, tu dois enlever ta ceinture, sortir ton portable, ta carte d’embarquement et tout le bordel avec une main handicapée… 2/  j’ai acheté Happinez, mon magazine préféré, trop contente de le lire dans l’avion, mais dommage, quand j’ai voulu l’ouvrir, je me suis rendu compte qu’il était en Néerlandais…

Et voilà les premiers jours du reste de ma vie m’auront servi à retracer les derniers jours du reste de mon ancienne vie…

Je finirais ce billet en remerciant de tout mon coeur les deux femmes, Nadine et Cécile et leurs poulettes respectives qui se sont trouvées là au milieu d’un passage étroit de mon existence et qui sans le savoir ont tellement contribué à mettre de la beauté et de l’espoir pour les premiers jours du reste de ma vie ! 

Pour la suite, un autre billet bientôt…et si vous avez des témoignages d’enfants qui s’en vont et surtout de parents qui restent, je suis toute ouïe…